Question :
Je suis agriculteur sur une commune du Gers, frontalière des Hautes-Pyrénées. J’exploite 68 ha dont je suis propriétaire, en élevage bovins et céréales
Je suis démarché par une société de développement photovoltaïque qui me propose de me prendre en location 10 hectares de terres incultes que je possède, mais avec une très belle exposition au sud, pour y installer une ferme photovoltaïque.
Le loyer proposé est très intéressant.
La société me propose au choix, un bail à construction d‘une durée de 30 ans ou un bail emphytéotique sur une durée de 18 ans.
Quel doit être mon choix ?
Réponse :
Les deux baux sont des baux à long terme qui confèrent au preneur un véritable droit réel immobilier sur les terres. Il pourra consentir une sûreté réelle sur le bien à titre de garantie, céder ses droits ou en faire apport en société sans l’autorisation du bailleur.
Dans le bail à construction, le preneur s’engage à édifier sur les terres louées des constructions dont il s’engage à assumer l’entretien pendant toute la durée du bail. Il doit conserver les constructions ainsi édifiées en bon état jusqu’à la remise desdites constructions au bailleur.
En effet, les parties peuvent convenir d’un loyer révisable tous les trois ans, dont le montant sera fonction du revenu brut de l’immeuble. Ils peuvent aussi convenir que le loyer sera constitué par la valeur des constructions remises en fin de bail.
Une telle modalité de fixation du loyer semble incompatible avec la location d’une ferme photovoltaïque.
Le bail à construction diffère du bail emphytéotique en ce que, si dans les deux contrats, il peut être prévu une obligation d’édifier des immeubles, le preneur du bail à construction est dans l’obligation de réaliser les constructions convenues, contrairement au preneur du bail emphytéotique qui n’a aucune obligation.
Si par extraordinaire il ne disposait pas des autorisations à cette fin le bail emphytéotique survivrait alors que le bail à construction serait déclaré nul.
Vous avez donc a n intérêt a priori à choisir le bail à construction.
Cependant, la fiscalité de ce type de baux de moins de 30 ans (article 33 ter : II du CGI) est dissuasive.
En effet, quel que soit le loyer, lorsque les immeubles sont remis en fin de bail au bailleur, la loi fiscale considère qu’il s’agit d’un complément de loyer :
Lorsque le bail à construction a une durée supérieure ou égale à 30 ans, la remise gratuite des constructions édifiées par le preneur n’est pas taxable.
Si la durée du bail est comprise entre 18 et 30 ans, la remise des immeubles en fin de contrat est assimilée à un revenu taxable dans la catégorie des revenus fonciers, s’il s’agit d’une personne physique.
La base de l’impôt dû est constituée du coût de revient des constructions, sous déduction d’une décote de 8% par année de bail au-delà de la 18ème.
Exemple : Un bail à construction a une durée de 25 ans. Le bailleur bénéficiera d’une décote de 7 x 8% = 56% , et sera imposé sur 44% de la valeur des constructions lui revenant.
Le bailleur peut demander que l’imposition soit étalée sur l’année au cours de laquelle les biens lui reviennent et les 14 années suivantes mais attention, le Conseil d’Etat considère que pareille option doit faire l’objet d’une « mention expresse » sur la déclaration d’impôt sur le revenu.
Christine FAIVRE,
SCP NONNON & FAIVRE
Avocate,
Spécialiste en Droit Rural, Baux Ruraux et Entreprises Agricoles